Pourquoi cette campagne interne est profitable à la droite nationale

La campagne interne du Front National possède une vertu bien réelle : elle nous donne l’occasion d’exposer les fondements de la pensée nationale. A la faveur de cette campagne, nous sommes tous invités à faire un point, à scruter dans notre programme politique les principes qu’il recèle, à explorer les implications les plus ultimes de notre combat. Le Front National vit en effet sa crise d’adolescence, qui se révèle être une crise profonde d’identité : à quelle structure de pensée sa doctrine se raccroche-t-elle finalement? Sur quelles valeurs son action repose-t-elle fondamentalement ? Alors même qu’il pourrait sembler séduisant de rallier en partie la pensée dominante afin de se faire accepter par le système, voilà pourtant des questions auxquelles les deux candidats à la succession du président doivent tenter de répondre. La survie du nationalisme français est à ce prix.

« Sur la défense de la nation », répondrons spontanément un certain nombre d’entre nous. Certes. Mais quelle vision de la nation doit éclairer le combat frontiste ?

La nation n’est-elle qu’un concept et une idée, telle que la devise républicaine semble le suggérer ? Ou bien est-ce une réalité charnelle, qui possède une identité particulière ? Le programme frontiste répond tacitement à cette interrogation : son refus de voir entrer la Turquie dans l’union européenne implique en effet une conception charnelle de l’identité nationale. Car le Front ne suspend pas l’entrée de la Turquie à une adhésion idéologique, à la reconnaissance de certaines valeurs universelles auxquelles d’ailleurs n’importe quelle nation pourrait souscrire, mais il récuse définitivement son entrée dans l’Europe pour des motifs géographiques, historiques et culturels.

La nation est-elle une totalité ? Ou bien admet-elle en deçà l’existence de corps intermédiaires, et au-delà celle de principes supérieurs ? Il existe en effet deux modèles sociétaux bien distincts : le modèle libéral qui, dans le sillage des philosophies du contrat social, s’articule exclusivement autour de l’individu et de l’Etat ; et le modèle traditionnel qui reconnaît la nation comme une réalité naturelle et organique, laquelle repose ainsi sur des corps intermédiaires au premier rang desquels la famille. Précisément, la nation repose-t-elle sur le citoyen ou sur la famille ? Si le citoyen est la cellule de base de la société, celle-ci ne sera jamais qu’une addition d’individus. Peut-on cependant faire du social à partir de l’individuel ? En inscrivant dans son programme, à rebours de l’idéologie dominante, la défense d’une politique familiale et nataliste, situant la famille comme la « cellule de base de la société », le Front National se rattache implicitement à un modèle sociétal traditionnel.

« La république ne reconnaît que le citoyen », entend-on jusque dans nos rangs : mais la France, pour être pérenne, doit  reconnaître la famille. Comment le Front pourrait-il en effet s’affranchir d’une politique familiale quand il souhaite que survive le peuple français à l’heure où l’immigration de peuplement sécrète déjà de graves problèmes identitaires ?

Il faut souligner a contrario que le modèle libéral, dans lequel ne subsistent que l’individu et l’Etat, rappelle étrangement le modèle européiste et mondialiste dans lequel un pouvoir lointain et oligarchique, qui a confisqué les prérogatives des sociétés d’ordre inférieur, a la prétention de s’imposer directement et indistinctement à tous les individus. Là encore, le Front National ne peut pas rejoindre un modèle de société qui rentre en contradiction avec les principes qui animent par ailleurs le combat national.

Quant au refus de notre mouvement d’assimiler la nation au marché, et donc l’homme à un producteur ou un consommateur, il ne va pas sans une condamnation du matérialisme et du consumérisme ambiant, et par conséquent sans le rappel des principes supérieurs dont Jean-Marie le Pen a toujours souligné l’existence.

Bref, défendre la nation, c’est bien, mais pas de n’importe quelle manière, pas n’importe quelle nation. Le plus petit dénominateur commun cher au démagogue est semence de confusion. Le Front National ne peut donc pas se soustraire à une telle réflexion : y sont suspendues en effet les convictions des patriotes.

Refuser de considérer ces questions sociétales comme prioritaires, c’est refuser de fonder son action sur une vision claire et structurée de la société, c’est rejeter la colonne vertébrale autour de laquelle se construit pourtant la pensée nationale, c’est finalement programmer la lente désagrégation du nationalisme français. Car la nature a horreur du vide : abandonner ou taire les principes traditionnels sur lesquels repose la société revient mécaniquement à adopter les principes actuels de la pensée dominante dont on devient alors, bien malgré nous peut-être, les malheureux tributaires…

Edouard

18 réflexions sur « Pourquoi cette campagne interne est profitable à la droite nationale »

  1. Voila qui est bien dit! je crois que c’est sur cette analyse juste que se fonde notre doctrine. et elle peut rassembler largement. les references a la republique et a la democratie viennent apres. entre parenthese, le communique piteux du fnj lu sur npi est derisoire et vide d’idee.
    allez bruno!

  2. « Car le Front ne suspend pas l’entrée de la Turquie à une adhésion idéologique, à la reconnaissance de certaines valeurs universelles auxquelles d’ailleurs n’importe quelle nation pourrait souscrire, mais il récuse définitivement son entrée dans l’Europe pour des motifs géographiques, historiques et culturels. »
    Le contraire de l’idéologie mortifère FM, vers laquelle on tend inexorablement , si l’on considère comme la concurrente que la Nation est un concept abstrait et que la laicité est la valeur suprême.

  3. Excellente analyse, comme d’habitude! Quand on lit à côté le texte minable du FNJ, on voit vite qu’ils ne jouent pas dans la même cour que vous. On attend désespérément du FNJ ou de NPI un texte de la même volée et de la même hauteur intellectuelle. Mais les enjeux que vous soulevez et que vous traitez avec beaucoup de pertinence semblent complètement leur échapper. Ils restent en surface les pauvres. Incapables de répondre aux JAG sur le fond.

  4. Ces abrutis confiscateurs du FNJ expliquent que JAG sont des grands méchants parce que dans leurs discours ils rejettent le discours républicains alors que le FN s’set toujours réclamé de la république. En effet Charles, ils n’ont rien compris aux enjeux ces gamins. Comme on le comprend très bien sous la plume de Jean dans ce nouvel article, ce n’est pas une question de régime politique, mais de modèle sociétal, de principes politiques :

    Jean a raison lorsqu’il dit que la devise républicaine est universelle et qu’elle peut convenir à tous les pays du monde, alors qu’une identité est particulière par définition. Toutes ses critiques sont pertinentes. En face, les concurrents font mine de ne pas les comprendre car ils sont incapables d’y répondre. Ils versent dans la caricature en expliquant qu’on veut revenir à une monarchie de droit divin!!! Rachline, retourne dans ton bac à sable et laisse donc les grands parler politique !

  5. J’avoue que longtemps j’ai hésité entre les deux candidats. Chez les marinistes, on dit beaucoup de mal des soutiens de Bruno. Ce sont les échos que j’ai. Sans doute pour atteindre indirectement Gollnisch. Alors je suis allé voir moi-même pour me faire une idée, surtout sur votre site puisque j’ai appris que le directeur des JAG a été viré à cause ce ce site. J’ai lu tous les articles dans la rubrique « à lire », l’argumentaire « Pourquoi Bruno Gollnisch », j’ai parcouru ce site.

    J’avoue que intellectuellement, ils posent les vraies questions et sont très pertinents. Rien à voir avec NPI. Quant au ton, je m’attendais à bien pire après tous ce que NPI disait de ce site. Je pense que le ton de NPI est bien plus mauvais, et que les insultes sont beaucoup plus féquentes chez eux quoiqu’ils se sont un peu assagis depuis peu. Bref, je ne comprend pas le parti pris partisan de le Pen qu fut pourtant un grand. Mon choix est fait ce sera Gollnisch, et dans ma famille aussi.

  6. Louis, la question institutionnelle n’est absolument pas accessoire. Je pense que leur gueuse et l’idéologie qui la sous-tend n’ont pas fait beaucoup de bien à la France depuis deux siècles, mais il faut pouvoir participer aux élections du régime et plus généralement à la vie politique du pays pour s’adresser au peuple. Lui conseiller de se poser des questions sur la valeur de la république pour la France, compte tenu de sa personnalité acquise au cours des siècles voire des millénaires me paraît une démarche de salut public.

  7. Juste une réfléxion…

    « Ils versent dans la caricature en expliquant qu’on veut revenir à une monarchie de droit divin!!!  »

    Et même si l’on retournait au « droit divin » ???
    Le Roi de France qui s’est le plus inspiré de l’idéologie du roi divin était, je crois, Louis XIV.

    N’oublions pas le rapprochement qu’il y a eu entre Louis XIV et son Peuple. Certes, Louis XIV a été intransigeant envers la Noblesse de son royaume. Cela a principalement été due à une méfiance de sa part quant à en revenir à la -une Fronde. Mais Louis XIV admirait son peuple, des personnes le composant. Louis XIV a toujours recherché son bien être et la grandeur de la France, elle-même. Loin de tout état actuel de profits personnels. Déjà tout jeune, Louis XIV savait qu’il devait sa propre personne à une conduite exemplaire de sa part: le don de soi, dans un but de bien commun envers celui-ci, et cela uniquement du fait qu’il estimait que son pouvoir divin lui venait de Dieu, lui-même.

    Lorsque l’on fait l’abnégation de l’existence de Dieu, on tombe généralement dans l’idée d’exclusions. Ce qui a souvent été le cas avec la république et de ceux qui ont usurpé le pouvoir au nom, comme je l’ai dit, d’intérêts personnels. Souvent imposés par la terreur. Encore une fois, ne nous étonnons pas que la situation économique actuelle soit tombée dans l’ultra-libéralisme, d’abandon de l’intérêt général du peuple français et de la France elle-même, qui n’en est, en fait, que l’une de ses conséquences. 🙁

    J’aimerais bien que les gens qui dorment dans la rue lisent le texte de NPI sur la république, et sur le « droit divin »… Je pense très sincèrement qu’ils leur riraient tout simplement au nez.

  8. Je ne peux que féliciter l’auteur (une fois encore) de ce merveilleux article, et à sa doctrine à laquelle j’adhère totalement. Définitivement, je me reconnais dans la pensée de « Jean » et Bruno Gollnisch, et face à cela et aux critiques sans relief intellectuel venant de l’autre camp, je suis dors et déjà certain d’où se situe le combat que je souhaite mener pour le bien de ma Patrie !

  9. Personnellement je préfère qu’on soit diabolisés par des raclures que d’ânnoner le catéchisme ripoublicain comme « pacte républicain », « laïcité » etc. à tour de bras. Comme disait Platon, être traité d’imbécile par un idiot est un honneur. De même, être diabolisés par des pourris est un honneur.

  10. à Ron

    Vous oubliez étrangement de citer cet article qui mentionne que Marine et JMLP se font insulter par des soutiens de Bruno Gollnisch:

    http://www.lejdd.fr/Politique/Actualite/Soutien-de-Gollnisch-Jerome-Bourbon-multiplie-les-attaques-contre-Marine-Le-Pen-236668/?sitemapnews

    Vous les JAG quel est votre réaction au fait que l’on insulte le président fondateur de votre parti ?

    [modération : nous conservons notre affection au président pour le combat qu’il a longtemps mené et pour ce qu’il représente dans l’opinion. Mais puisque nous ne sommes pas d’extrême droite, nous n’avons pas non plus le culte du chef et nous savons garder intègre notre discernement: nous ne suivons des hommes que parce qu’ils incarnent un idéal et portent nos espoirs. Mais l’idéal subsiste, pas l’homme. Aussi, c’est faire honneur à Jean-Marie le Pen que de ne pas le suivre dans chacun de ses choix partisans seulement parce qu’il est le président. Car c’est porter davantage de crédit au combat qu’il mène par ailleurs et dans lequel, librement, nous le suivons avec enthousiasme.]

  11. Ce que je retrouve sur ce site et dont NPI semble dépourvu, c’est une colonne vertébrale doctrinale, c’est une clairvoyance idéologique dont on ne peut pas faire l’économie si l’on veut suciter une alternative crédible au système en place.

    Je pense que les partisans de Bruno Gollnisch ont gardé intact les fondements de la pensée des pères du nationalisme français. Ce que révèlent d’ailleurs les soutiens de Bruno dans leurs communiqués: nombreuse allusions à Barrès, Maurras, Péguy… En face, c’est le vide manifestement. Marine est belle, jeune, et passe bien à la télé : mais cela reste tout de même le degré zéro de l’argumentation politique.

  12. @ PHILIPPE

    « degré zéro de l’argumentation politique »

    Vous êtes gentil. Perso, je dirais qu’ils ont atteint les profondeurs abyssales… D’ailleurs, ils ne devraient pas tarder à trouver du pétrole ! 😀

  13. Oui Jacques? [modération : Jacques a été modéré pour avoir douté de la loyauté de Marine le Pen. Il comprendra.]

  14. A la lecture de ces commentaires forts bien modérés par le responsable du blog, il apparait une évidence de fond et de forme dans les différentes réactions !
    Entre l’autre site et le votre , il y a un million d’années lumières de pertinence d’intelligence et de finesse politique et sémantique.
    Si j’étais mauvaise langue, je dirais que la coimparaison vaut pour les deux candidats.
    Entre un « vu à la télé  » estampillé du système et un candidat courageux, véritable homme d’Etat , disposant de soutiens et d’équipes bien plus éminentes autour de lui, qui le suivent pas seulement pour son charisme et son humanisme mais pour ses idées et sa ligne .

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