Bruno Gollnisch: « Mes positions sont mieux enracinées que Marine le Pen »

GOLLNISCH, L’HOMME QUI VEUT BATTRE MARINE LE PEN 

Gollnisch a très mal pris que Jean-Marie Le Pen, au risque de faire du FN une affaire de famille, ait choisi sa fille Marine pour lui succéder à la tête du parti. Son pari : il va la battre, il va les battre. « C’est du 50-50 », affirme-t-il.

Bras droit historique de Jean-Marie Le Pen – dont il était le directeur de cabinet lors de la présidentielle de 2002 –, l’universitaire Bruno Gollnisch, 60 ans, a épousé une femme d’origine japonaise, et ils ont trois enfants : l’une des filles est avocate, l’autre rêve de devenir « businesswoman » et le garçon est officier de marine.

France-Soir. A l’opposé du clan Le Pen, vous avez toujours été très discret sur votre vie privée…
Bruno Gollnisch.
Je n’ai rien à cacher mais, c’est vrai, j’ai toujours voulu protéger ma femme et mes enfants. S’il y a une chose dont j’ai horreur, c’est bien, comme on dit, de la « pipolisation ». Pour moi, c’est très simple : c’est le degré zéro de la politique. Cela me vaut, chez certains, une réputation de « monstre ». Mais, vous savez, même les monstres ont parfois un peu d’humanité (éclat de rire) !

F.-S. Au Front national, vous le Lyonnais, vous apparaissez comme le provincial de la bande…
B. G.
D’abord, je ne suis pas lyonnais mais alsacien. Ensuite, je ne suis pas « le » provincial, comme vous dites : je me considère comme un « petit » provincial. Mais, pardonnez-moi, cela me donne une sacrée force morale ! J’ajoute que, depuis peu, j’ai mis en vente ma maison des monts du Lyonnais…

F.-S. Vous déménagez ?
B. G.
Oui. Je vais m’installer dans les Yvelines. Que voulez-vous ? Je me recentre. Il le faut, puisque j’ai bien l’intention de devenir demain président du Front national. Et tant pis si, à cause de cela, je vais être obligé de me séparer de ma chère bergerie !

F.-S. Face à Marine Le Pen, vous apparaissez pourtant comme un simple outsider. Sérieusement, croyez-vous à vos chances ?
B. G.
Je passe, je le sais, pour l’éternel second. En plus, je serais ravi de ce statut. Eh bien, il va y avoir des surprises ! Je veux gagner, je vais gagner car j’ai un réel ancrage au sein du Front national. D’ailleurs, c’est très simple, si je ne l’avais pas eu, je n’aurais pas tenté l’aventure.

F.-S. C’est une vraie « aventure » effectivement, puisque Jean-Marie Le Pen soutient à fond sa fille…
B. G.
Il m’a surpris. N’y a-t-il pas là, de sa part, un signe de nervosité ? Car, il y a six ans déjà, il avait été le premier à m’encourager, à me soutenir, à présenter ma candidature a priori comme la plus légitime.

F.-S. Alors, que s’est-il passé ?
B. G.
Demandez-le lui ! Ce que je sais, c’est que la succession quasi monarchique qui se prépare ne plaît pas à tout le monde. Beaucoup de gens me disent qu’ils sont choqués. Il y a même une militante hyper-lepéniste qui, à cause de cela, m’a envoyé l’autre jour un chèque de 4.000 € !

F.-S. En voulez-vous à Jean-Marie Le Pen ?
B. G.
Pas une seconde ! Mais j’aurais préféré qu’il conserve sa position d’arbitre.

F.-S. Quelles sont, à vos yeux, les qualités de Jean-Marie Le Pen ?
B. G.
Il est opiniâtre, intuitif, cultivé, et quel tribun !

F.-S. Et les qualités de sa fille Marine ?
B. G.
Elle est assez pugnace, elle est intelligente.

F.-S. Et vous, quelles qualités vous attribuez-vous par rapport à Marine Le Pen ?
B. G.
Mes convictions sont mieux enracinées. Je suis moins pragmatique qu’elle. J’ai une doctrine sans être un doctrinaire.

F.-S. Si vous deviez estimer vos chances d’accéder en janvier à la tête du FN…
B. G.
C’est du 50-50. Je vous rappelle que je suis arrivé en tête des scrutins dans les trois derniers congrès du parti. Evidemment, ce qui risque de peser beaucoup dans la balance, c’est mon déficit médiatique : il n’y en a que pour Marine Le Pen. En 2002, j’étais le directeur de campagne du candidat Le Pen ; dès le lendemain du scrutin, le robinet s’est tari. C’est comme si je n’existais plus. Aujourd’hui, le malheureux Gollnisch boxe avec une jambe attachée au ring et un bras bloqué dans le dos !

F.-S. Et si vous perdiez ?
B. G.
Je n’en suis pas à envisager une hypothétique défaite ! Cela dit, j’ai noté que Marine Le Pen a proposé à la cantonade de m’attribuer, si elle gagne, le fauteuil de vice-président, et de n’en attribuer qu’un. C’est très généreux de sa part (éclat de rire).

F.-S. Quel est l’état de vos relations avec Marine Le Pen ?
B. G.
La plupart du temps, correctes. Ce n’est pas parce que nous sommes concurrents que nous sommes ennemis. Même s’il a pu y avoir, de temps en temps, entre nous de petits accrochages.

F.-S. Vous passez pour le « dur » du FN tandis qu’elle incarnerait une image plus moderne…
B. G.
Je connais la chanson : je suis le représentant des vieux cons, des fachos, des extrémistes, des révisionnistes, des ringards, des bornés. Et il y aurait, en face de moi, une jeune femme moderne et bien de son temps. L’émergence de Marine s’est faite, c’est vrai, sur le thème de la modernisation, de la déringardisation, de la dédiabolisation. Elle veut donner du parti, me dit-on, une image plus respectable. Mais, dans les faits, ça veut dire quoi ? Je vous réponds : ça ne repose strictement sur rien. Tout cela a fait flop. C’est simplement un genre qu’elle se donne. Un exemple : l’immigration. Marine, je vous le garantis, est capable de tenir des propos bien plus à droite que moi !

F.-S. Quelle est, au sein du FN, votre « valeur ajoutée » ?
B. G.
Je crois en une vraie modernité enracinée dans la tradition. Je défends une conception charnelle de la France. En 2007, lors de la campagne de Jean-Marie Le Pen, Marine avait plaidé pour une France débarrassée de toutes ses spécificités : ethniques, spirituelles, culturelles… Je pense exactement l’inverse.

F.-S. Marine Le Pen, dit-on, n’exclut pas – à long terme – une forme de rapprochement, un jour, avec la droite…
B. G.
Mon objectif à moi, c’est de réunir la grande famille nationale. Y compris en ralliant à nous la droite sociale, voire la gauche patriotique. Je pense à un certain nombre de gens qui n’ont jamais été au FN mais qu’il est tout à fait envisageable d’y faire venir : Philippe de Villiers, Christine Boutin…

F.-S. Et les alliances ?
B. G.
Je ne suis ni pour ni contre. Il faut simplement trouver des partenaires prêts à les assumer, et qui acceptent de mettre en application une partie au moins de notre programme.

F.-S. Vous classez-vous à l’extrême droite ?
B. G.
Pas du tout ! Je fais partie de la droite nationale, je ne suis extrémiste en rien. C’est la société qui, depuis quarante ans, depuis que j’étais à la fac de Nanterre, jeune étudiant en droit, l’anti-Cohn-Bendit, s’est « gauchisée » !

F.-S. Serez-vous, si vous êtes élu, candidat à la présidentielle ?
B. G.
Je n’exclus rien. Mais, à l’heure actuelle, moi, je ne mélange pas les deux choses.

F.-S. Comment jugez-vous l’état du pays ?
B. G.
Nous sommes en 1788.

F.-S. Si François Fillon quitte Matignon, qui imaginez-vous à sa place ?
B. G.
En tout cas pas Borloo, qui, en 1968 à Janson-de-Sailly, occupait la loge du concierge ! Quant à Fillon, s’il saute, il sortira par le haut, cas rarissime sous la Ve République !

F.-S. Croyez-vous à la réélection de Nicolas Sarkozy en 2012 ?
B. G.
Il n’a pas de doctrine, il est globalement assez faible, son gouvernement n’a plus prise sur rien ou presque, mais l’homme a une indiscutable vivacité. Tout peut arriver certes, mais je n’exclus pas sa réélection.

Propos recueillis par Noémie Taylor et Dominique de Montvalon pour un article de France Soir.

5 réflexions sur « Bruno Gollnisch: « Mes positions sont mieux enracinées que Marine le Pen » »

  1. « Je crois en une vraie modernité enracinée dans la tradition. Je défends une conception charnelle de la France. En 2007, lors de la campagne de Jean-Marie Le Pen, Marine avait plaidé pour une France débarrassée de toutes ses spécificités : ethniques, spirituelles, culturelles… Je pense exactement l’inverse » (Bruno Gollnisch).

    Moi aussi. Je soutiens Gollnisch à 100% !

  2. Je crois que ça va chauffer dans pas longtemps.
    Je ne m’en réjouis pas mais c’est un passage obligé au FN.
    A suivre…

  3. Bravo , BG montre enfin les dents , après toute les basses attaques dont il a été victime de la part du ff.
    Et il n’a pas honte de se revendiquer de la droite nationale; le vent souffle à droite en Europe , seule la France continue de se gauchiser , et il n’y a rien de plus ringard que de vouloir se gauchiser -suivez mon regard, comme l’on dit.
    Par contre … Boutin Un peu étonnée , mais cela ne m’empêchera pas de voter pour BG !
    « Marine avait plaidé pour une France débarrassée de toutes ses spécificités : ethniques, spirituelles, culturelles… » cela porte un nom, mais chut …

  4. A propos de Villiers et Boutin, Bruno a rectifié les propos rapportés par France Soir: il n’a pas dit souhaiter une alliance avec eux, mais que leurs anciens militants qui sont orphelins maintenant rejoignent le FN.

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