Nous y sommes. Les adhérents se sont exprimés. Marine le Pen est désormais présidente du Front National. Nous regrettons que les militants se soient référés aux qualités médiatiques de la candidate, lesquelles sont davantage liées à la fonction de porte parole, quand il s’agissait pourtant d’élire un président. Il eût fallu interroger les projets au nom desquels les candidats se sont présentés –mais le débat de fond, pourtant indispensable dans une campagne politique qui oppose deux concurrents, a soigneusement été évité ; les aptitudes à l’exercice des fonctions briguées ; et encore la capacité à rassembler notre famille politique, inutilement mais dangereusement divisée. Autant de paramètres qui semblent avoir été sacrifiés sur l’autel de la médiatisation. Nous pensions quant à nous que le Front National valait plus que cela.
Beaucoup de partisans de Bruno Gollnisch se sont tournés vers nous depuis ce week-end, afin de connaître la conduite à tenir après le congrès. Le mot d’ordre est simple. Ne nous dispersons pas ! Ne tentons pas de susciter à la nouvelle direction du Front National une concurrence qui, à l’instar des précédentes, se soldera par un échec électoral dès aujourd’hui prévisible. Avec un tiers des suffrages portés sur sa candidature, Bruno incarne au sein du Front un courant idéologique désormais incontournable, lequel lui permet d’exister politiquement et d’apparaître éventuellement comme un recours. Alors restons mobilisés ! Nous serons au Front, derrière Bruno Gollnisch, semblables à des sentinelles vigilantes. Car les adhérents n’ont pas signé un chèque en blanc à Marine le Pen : le rapport de force au comité central révèle qu’ils comptent sur les soutiens de Bruno Gollnisch pour équilibrer l’appareil, à défaut d’incarner un véritable contre-pouvoir.
Nous souhaitons par ailleurs bonne chance à Marine le Pen pour le combat qu’elle doit mener dès maintenant, à la tête du Front National, contre les forces obscures du mondialisme qui détruisent les institutions naturelles que sont la famille et la nation. Mais l’expérience nous enseigne également que si l’on n’a pas de principes forts à opposer au système, celui-ci nous impose les siens. C’est pourquoi, après avoir entendu le discours présidentiel qu’elle a prononcé dimanche à Tours, nous maintenons nos réserves :
- Nul part dans son discours Marine le Pen n’a fait allusion à la défense des valeurs familiales. Sont-elles définitivement absentes de son « logiciel », étrangères à sa culture politique ? En affirmant dimanche qu’ « il n’existait qu’une seule communauté, la communauté nationale », Marine le Pen suggère que la société repose sur l’addition des citoyens, se rattachant ainsi à une structure de pensée libérale, à rebours du programme frontiste qui affirme que la famille est la première communauté, « la cellule de base de la société ». Cette vision libérale, assise sur l’individu, est pourtant facteur de consumérisme et destructrice des valeurs traditionnelles dans lesquelles s’enracine notre civilisation. Nous nous étonnons de ce qui nous apparaît alors comme une contradiction : comment peut-on s’opposer au libéralisme économique lorsqu’on souscrit -fût-ce implicitement- à un modèle sociétal libéral dans lequel ne subsistent que l’individu et l’Etat? Car le libéralisme politique et le libéralisme économique, comme le libéralisme éthique, procèdent du même principe : l’individualisme.
- Par ailleurs la France a, hier encore, été rattachée à des valeurs universelles – mais l’identité n’est-elle pas singulière ? – et abstraites – mais la France n’est-elle qu’une idéologie politique, ou bien un concept éculé à l’heure de la mondialisation ? Il existe sans doute des valeurs universelles, mais alors elles ne sont pas singulièrement françaises.
- Et précisément, le discours présidentiel d’hier, en définissant la laïcité comme le confinement de la religion à la vie privée, s’interdit de rattacher la nation à des principes supérieurs –à moins que les droits de l’homme et la devise républicaine soient devenus une nouvelle métaphysique : c’est laisser la nation sombrer dans le matérialisme autant que dans l’arbitraire et le positivisme juridique. Invoquer la laïcité contre la prolifération des mosquées, c’est s’interdire du même coup de pouvoir construire des églises en France, c’est encore s’offusquer du caractère ostentatoire de nos clochers et de nos calvaires. Reléguer la religion à la vie privée, et ne vouloir lui conférer aucune expression publique, c’est renier 1500 d’histoire de France où le christianisme a pénétré notre civilisation, notre philosophie, notre calendrier, notre tissu social, nos traditions. Cette conception de la laïcité, qui n’est pas une juste distinction entre le domaine temporel et le domaine spirituel, mais bien une séparation des deux sphères là où l’islam les confond toutes les deux, est donc, au même titre que l’Islam, contraire à l’âme et au génie français.
Aussi, la structure de toute pensée politique doit obéir à une hiérarchie de liens qui repose, en dernier ressort, sur une vision de l’homme considéré comme un sujet éthique, selon la sagesse de la pensée occidentale, digne héritière d’Athènes : l’économie doit donc être subordonnée à la politique, la politique à la morale, et la morale à la métaphysique. Ou l’histoire d’une civilisation…
C’est dans ce sens que nous espérons voir évoluer le Front. C’est le travail que les partisans de Bruno Gollnisch, au sein des instances dirigeantes, mais aussi dans les rangs militants, vont mener avec enthousiasme et persévérance. En espérant que nos attentes ne soient pas déçues, et parce que les difficultés, comme l’adversité, révèlent les âmes nobles et désintéressées des vrais combattants, nous voulons encore crier : vive le Front National, vive la France !
Jean